samedi 29 septembre 2012

Piqûre de rappel n° 1:
Blake, Goodyear, norvégien, veldtschoen, goiser....

Les techniques de construction des chaussures sont nombreuses et variées, et comme toutes les techniques artisanales elles ont évolué en fonction des matériaux disponibles et des besoins des clients. Plus on remonte vers le nord, et plus l'on grimpe en altitude, plus les chaussures deviennent lourdes, et plus elles sont construites selon des méthodes plus complexes.

Construction veldtschoen d'une botte Kelso
Ce qui convient pour un mocassin que l'on porte l'été à Rome ne convient pas pour la chaussure d'hiver d'un montagnard autrichien ou d'un pêcheur norvégien. Le premier sera principalement collé, avec peut-être une unique couture de renfort, alors que notre montagnard aura besoin de chaussures qui lui tiennent les pieds au chaud et au sec tout en les protégeant.


Ce post est un bref rappel des principales techniques de construction des chaussures pour homme, partant du plus simple au plus complexe. Nous sommes très reconnaissants au blog américain Denim Life, au bottier italien Scarpe di Bianco et à la boutique vintage en ligne Classic Shoes For Men pour les excellents dessins et illustrations que nous leur avons empruntés pour illustrer ce billet.

La construction la plus simple est le collé, aussi appelée "soudé", dans laquelle semelle, doublure et tige sont assemblées avec des adhésifs idoines, sans aucune couture. Cette technique convient aux chaussures les plus légères, et ne doit pas être dédaignée a priori car d'une part la qualité des colles s'est beaucoup améliorée, et d'autre part certains mocassins très fins ne pourraient être construits autrement.

lundi 24 septembre 2012

Quelles chaussures porter à la Fête de la Bière?

Ça y est, après en avoir entendu parler pendant des années, votre décision est prise: vous allez profiter d'un déplacement d'affaires en Allemagne pour faire un tour à l'Oktoberfest, la célèbre Fête de la Bière pour laquelle Munich est célèbre dans le monde entier. La 179ème édition a été inaugurée samedi, et fermera ses portes le 7 octobre.

Les bavarois ont une conception particulière des chaussettes...
Vous n'allez pas aller jusqu'à acheter une culotte en cuir, mais en touriste respectueux des coutumes locales vous vous demandez comment vous chausser pour l'événement. Et les photo-reportages, plus portés sur le décolleté des serveuses que sur les chaussures d'homme, ne vous sont d'aucun secours. Que faire pour vous renseigner?

Heureusement, nous veillons pour vous, et vous avons préparé, juste à temps pour l'inauguration de la fête, une sélection des plus belles chaussures traditionnelles du sud de l'Allemagne, complément indispensable du costume national bavarois.

Haferlschuhe bavaroise de luxe
La chaussure traditionnelle bavaroise, appelée Haferlschuhe, (littéralement, chaussure-gobelet) tient probablement son nom des touristes anglais qui, la découvrant pendant leurs séjours dans les Alpes, l'appelèrent "half-shoe", ou demi-chaussure, par rapport aux bottines, seules chaussures qu'ils connaissaient alors. Et ce "half-shoe" devint "ha(l)ferl" dans la bouche des paysans bavarois qui l'entendaient. Quoi qu'il en soit, sa ligne générale surprend, et plutôt agréablement car bien proportionnée, et ne ressemble à aucune autre.

D'abord, quelle que soit la saison, elle se porte plutôt sans chaussettes, ce qui exige une doublure très douce et une semelle intérieure rembourrée. Elle est très décolletée sur les côtés mais remonte très  haut sur l'avant et l'arrière de la cheville; elle se lace sur le côté extérieur, et non au centre, et elle a une semelle très épaisse et fortement crantée pour assurer une bonne adhérence lors de la marche en montagne, que ce soit en grimpant ou en descendant. Les versions modernes, plutôt orientées "ville", ont des semelles en cuir.

Les modèles de base sont très abordables
On dit que ces "demi-chaussures" furent mises au point en 1803 à Oberstdorf, dans l'Allgäu, région de l'extrême sud-ouest de la Bavière, par un certain Franz Schratt, bottier de son état, qui s'était inspiré des sabots des chamois, qui sont étroits mais offrent néanmoins une grande sécurité d'appui et de marche.

Il s'inspira également des sabots et autres chaussures fabriquées à la maison par les fermiers de la région. Le succès fut fulgurant. A la fin du 19ème siècle, il y avait dans la petite région de l'Allgäu plus de 800 bottiers produisant à la demande ce type de chaussure, qui fut largement popularisé par les touristes anglais qui prenaient leur vacances dans les Alpes bavaroises. Elles furent adoptées petit à petit par les citadins bavarois et, selon l'un des producteurs encore en exercice, devinrent très populaires dans les années 1920.

Aujourd'hui, ces chaussures à l'esthétique originale et séduisante (pour la campagne et la montagne, mais peut-être pas pour le bureau, convenons-en) se rencontrent rarement en dehors de la Bavière, où elles restent étonnamment populaires. On en trouve également sur internet, à des prix plus que raisonnables pour des chaussures aussi originales, confortables et bien adaptées à la marche en montagne. Il en existe en cerf, en cuir nappa, en vachette, en daim; il en existe également des variantes très proches du "clog", c'est à dire pratiquement sans côtés, et même des bottines (avec semelles "commando" en caoutchouc de chez Vibram) qui ont adopté une ligne similaire.

Variante estivale très décolletée
La société Schwangau Schuh produit les haferlschuhe les plus soignées et les plus belles que nous ayons trouvées sur Internet, et les vend aussi en ligne. Ses modèles sont réalisés en cousu norvégien, cousu Goodyear et "semi-norvégien", dépourvu de semelle intermédiaire et ne comportant qu'une seule couture, ce qui donne une chaussure plus légère.

Elles ont beaucoup de cachet, et protègent le pied tout en restant, pour autant qu'on peut en juger d'après les avis ces acheteurs, très confortables, même lorsqu'elles sont portées pieds nus.

Version bottine de la haferlschuhe
Vous pouvez donc partir tranquillement à Munich, sachant désormais comment vous chausser et certain qu'ainsi vous pourrez passer pour un vrai bavarois. Et que personne ne prendra donc ombrage si, comme les vrais bavarois et les photographes, vous vous laissez distraire par les décolletés généreux, qui y sont aussi nombreux que les chopes de bière.   Prosit!



P.S.: Vous pensiez que nous allions vous laisser sur votre faim? Cliquez ici pour un panorama général de l'Oktoberfest.


Comme son nom l'indique, notre boutique en ligne Britannic Shoes ne vend pas encore de chaussures bavaroises (quoique....). En attendant, nous avons une large gamme de chaussures d'été, d'automne, d'hiver et de printemps; pour la plaine, la colline ou la montagne, la campagne et la ville. A vous de choisir.


(N.B.: ce post a été sensiblement modifié le 26 septembre)

vendredi 21 septembre 2012

Jack, George, Weejun, Wellie, Hush Puppies:
quelques noms étranges du monde de la chaussure

Le monde anglo-saxon domine, de la tête et des épaules, l'histoire de la chaussure, et encore aujourd'hui c'est la terminologie anglaise qui s'est imposée de par le monde. Nous avons vu précédemment la contribution de l'Inde britannique à la terminologie de la chaussure, et nous explorons ici quelques appellations anglaises et américaines qui ont un certain intérêt anecdotique.

Des excentricités américaines dans le civil...

Tout le monde connaît les mocassins "penny loafer" américains, dont le marché en Europe, et surtout en France, est dominé par ceux de marque Sebago. Mais on sait moins que ce type de chaussure a été inventé par la société G.H. Bass & Co., qui a commercialisé les premiers sous le nom de "weejun."






Le modèle Logan est une réédition contemporaine du premier mocassin "weejun" commercialisé par Bass, son inventeur.


D'où vient ce nom étrange? C'est la contraction phonétique de "Norwegian", c'est à dire norvégien, car ce mocassin a été copié sur les chaussures légères, mais solidement cousues, que portaient les pêcheurs de ce pays une fois à terre. Bass y ajouta une applique en cuir dans laquelle il découpa une sorte de losange aplati à but décoratif. Les étudiants de la Nouvelle Angleterre y mirent une pièce d'un centime ("penny") et voilà: le "penny loafer", c'est à dire le "mocassin au centime", était né.

Et d'où vient le nom de Hush Puppies, cette célèbre marque américaine dont le titre de gloire était d'avoir inventé les chaussures qui ne font jamais mal aux pieds?

lundi 17 septembre 2012

Lobb, vous avec dit Lobb? Non, je veux dire Lobb!
Mis à jour le 6 décembre 2012

Dans le monde de la chaussure de qualité, le nom de John Lobb a une consonance quasi magique; il symbolise en quelque sorte le nirvana de la chaussure sur mesure, que tout amateur de belles choses espère ajouter un jour à sa collection. Bien plus que la Rolex chère à Jacques Séguéla, une chaussure de chez Lobb incarne la réussite, et ce d'autant mieux qu'elle est discrète, et reconnue des seuls initiés.

C'est pourquoi l'annonce, l'autre jour, d'un partenariat entre John Lobb et le "styliste" anglais Paul Smith avait de quoi surprendre. Voilà donc que le bottier le plus connu au monde, inventeur entre autres de l'iconique chaussure à double boucle (double monk), s'associe à une société anglaise de mode masculine dont la réputation est à mille lieues de la sienne propre. Etrange partenariat, en effet....

Nous avons déjà pu nous faire une idée de la durée de vie des chaussures Paul Smith, et on peut juger de ses qualités de styliste en regardant sa dernière collection de chaussures, dont nous nous bornerons à dire qu'elle n'est pas notre tasse de thé.

On peut aussi se faire une idée de ses pratiques commerciales en observant qu'il vend une boîte de cirage au prix de 14€ les 50ml, près de trois fois le prix du Saphir Médaille d'Or (4,95€ les 50 ml), et près du double du cirage Burgol (9,52€ les 60 ml), les références en la matière.

On relèvera, aussi, que Paul Smith affirme que ce cirage est composé de "100% beeswax" (cire d'abeille), ce qui est manifestement impossible, car il ne contiendrait alors rien d'autre: aucun pigment, aucune huile, aucun solvant, ni aucun autre des composants utilisés dans les cirages, tel la cire de carnauba.

Mais l'affaire devient encore plus étonnante lorsqu'on examine le détail de la collaboration entre ces deux marques. Lobb dit qu'elle lui permet de bénéficier de "la vitalité, l’humour et l’espièglerie qui font la réputation de Paul Smith." Et on tombe à la renverse en apprenant que "ce nouveau partenariat se traduit par l’ajout de touches de couleurs, signature de Paul Smith en quelque sorte, à trois emblématiques John Lobb, choisis pour leur histoire et pour l’attrait contemporain qu’ils exercent."

mardi 11 septembre 2012

Here comes the rain again.....

Peut-être pas de suite, mais la pluie et le mauvais temps seront bientôt de retour. Comment éviter qu'ils n'abîment ou ne marquent vos chaussures?

Les fabricants recommandent tous d'imperméabiliser chaussures et bottines avant même de les porter en extérieur, afin de les protéger contre non seulement la pluie mais également la boue et toutes les saletés humides que nos pieds ramassent dans la rue.


Toutes les marques de produits d'entretien proposent des sprays imperméabilisants pour cuir et daim, et qui devraient être renouvelés plusieurs fois par an, environ tous les dix ports. Évitez ceux qui contiennent du silicone, qui est à la base un composé huileux pouvant assombrir le cuir et, aussi, attirer poussières et autres saletés.


Attention, cependant, au choix de ces produits, car chez certains fabricants il en existe des différents selon la nature du cuir (lisse, gras, daim, nubuck, etc.), alors que d'autres commercialisent un produit censé convenir à tous les cuirs.


Cela étant, ces produits, qui coûtent une douzaine d'euros, ne sont pas indispensables, car les crèmes et, surtout, les cirages utilisés pour l'entretien habituel des chaussures ont un effet similaire, en recouvrant le cuir d'une fine couche protectrice qui résiste à l'eau.

jeudi 6 septembre 2012

Cirages n° 2: des origines à aujourd'hui

Si nous avons récemment examiné les trois principales marques de cirages de luxe européennes - Burgol la suisse, Collonil l'allemande et Saphir la française - il reste encore quelques marques moins connues a qui une clientèle fidèle a permis de survivre jusqu'ici, dans un marché international qui ne brille certes pas par la prime qu'il donne à la qualité.

En fait, le nombre de marques de cirage - ceux dans les boîtes plates en fer blanc, qui étaient jadis les seuls produits d'entretien - est très élevé, car il s'est créée une ou plusieurs de cirage "basique" dans pratiquement tout les pays où l'on porte des chaussures en cuir.

 Ainsi, parmi les plus exotiques, il existe encoure aujourd'hui de cirages sud-africains, japonais, néo-zélandais, brésiliens, turcs, russes et sans doute beaucoup d'autres que nous n'avons pas encore rencontrés. Qui connaît la Lincoln stain wax ci-contre? Elle est encore en vente, mais comment a-t-elle pu survivre jusqu'à nous?

L'un des objectifs de ce blog étant pédagogique, nous ferons dans ce post un survol des principales marques européennes, et notamment britanniques, car il existe dans ce pays une profusion de cirages méconnus, à diffusion confidentielle, tout comme en Allemagne et dans quelques pays de l'ancienne Europe de l'est. Comment survivent-ils?

Mais la plus connue de ces marques, celle qui domine quantitativement, et de très loin, le marché mondial, nous vient de l'hémisphère sud, d'Australie plus précisément, et porte pourtant un nom qui fleure bon la Nouvelle Zélande, en l'honneur de la nationalité de l'épouse de son inventeur.

lundi 3 septembre 2012

Un cadeau pour votre rentrée

Nous y voilà: c'est la rentrée, avec tout ce que cela comporte de désagréments et de retour à une vie de nouveau régie par les impératifs professionnels et familiaux.

Au cours de cet été, nous n'avons pas chômé, et notamment le mois de juillet a été particulièrement actif en raison des soldes, tandis qu'août a été consacré au "relookage" de notre site et à l'élargissement de notre offre, avec de nombreux nouveaux modèles de grande qualité qui sont déjà en vente.

Et aussi, disons-le, à l'écriture dans ce blog, que nous souhaitons développer pour en faire un lieu incontournable d'information non seulement pour nos clients, mais également pour tous les amateurs de belles chaussures qui ne le sont pas encore.

Vous avec accueilli favorablement cette initiative, car la fréquentation du blog a augmenté de 54% entre mai et juin, et encore de 48% entre juillet et août, après avoir étrangement stagné en juillet.

Nouveau site, nouveaux produits, blog en fort développement: pour nous l'été a été productif. Ceci n'a été possible que grâce à vous, nos clients et lecteurs, et nous voulons vous en remercier au moment de l'année où ce geste est le plus utile: la rentrée.

dimanche 2 septembre 2012

Cordonniers : le retour ?

Le fait que le métier de cordonnier, comme nombre de métiers artisanaux, ait frôlé la disparition au cours des dernières décennies n'étonnera personne, mais on sera tout de même surpris par l'ampleur de ce déclin.

Il y avait, en effet, 45.000 cordonniers en 1950, mais aujourd'hui leur nombre est tombé à 3.500,  selon la Fédération française de la cordonnerie et du multiservice. Ce qui veut dire qu'on est passé d'une moyenne de 1.25 cordonnier par commune en 1950 à un cordonnier pour 10 communes aujourd'hui. 

Les raisons sont évidentes: la masse de la clientèle, aujourd'hui, achète des chaussures bon marché qu'elle jette lorsqu'elles sont usées. Amorcée au début des années 1990 lors de l'arrivée sur le marché français des chaussures d'Europe de l'Est, de la péninsule ibérique et de Turquie, cette tendance a connu son paroxysme dans les années 2000, avec l'entrée de la Chine dans l'Organisation Mondiale du Commerce, le démantèlement de ce fait des barrières douanières, et le tsunami de chaussures à prix cassé qui s'en suivit.

Ceci a entraîne le même phénomène que dans le secteur du textile, de l'électroménager et même de l'informatique: la disparition de la production nationale et l'apparition du concept du "jetable", de l'approche "kleenex", car quand on achète "pas cher" il est plus économique de jeter et racheter du neuf que de réparer.